Culture
La petite histoire des petit* skis qui ont généré tant de haine.
ParLucie Piqueur12 janvier 2022
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Si vous avez fréquenté les pistes de ski dans les années 2000, vous vous êtes sûrement fait dépasser au moins une fois par ces ados un peu trop cool qui dévalaient les pentes entre deux pirouettes sur leurs minuscules skis. Ils étaient jeunes et libres, les snowbladeurs. Et la moitié se sont brisé un genou.
On vous raconte aujourd’hui l’histoire d’un sport d’hiver qui a connu la gloire, le bannissem*nt et les moqueries avant de faire son grand retour juste à temps pour la pandémie: le skiboard (ou patinette, pour les intimes).
¿Snowblade? Mini ski? Skiboard?
On les appelle souvent «snowblades», mais ce nom-là n’est qu’une marque déposée, et la pointe de l’iceberg. Les skis courts ont eu toutes sortes de vies et toutes sortes de noms. Ils sont apparus officieusem*nt dans les années 1930, quand les alpinistes européens coupaient leurs skis pour avoir quelque chose d’un peu moins encombrant à traîner avec eux (ils appelaient alors ça des «figls»).
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Mais c’est seulement en 1991 que les skiboards ont pris leur premier envol marketing. Ce sont les «BigFoots», de petit* skis littéralement en forme de grands pieds (avec les orteils pis toute) qui ont, les premiers, connu le succès (auprès des enfants européens de 12 ans). Leur forme bizarre a laissé une empreinte indélébile dans le domaine des sports d’hiver, puisque jusqu’alors, les skis étaient tous complètement droits, ce qui est pratique pour descendre en parallèle, mais demande un peu plus de pratique pour tourner ou faire des pirouettes.
On tenait quelque chose. Mais comment les appeler? Les Suisses penchent pour «patinettes», puisque leur utilisation fait penser à la version hiver des patins à roues alignées. Les anglophones, eux, trouvent qu’il s’agit plutôt d’un hybride entre ski et snowboard, et décident de les appeler «skiboards».
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Quoi qu’il en soit, en Amérique, il a fallu attendre les «Snowblade» de Salomon pour que la game change. Arrondis à l’avant et à l’arrière, sans bâtons, super simples d’utilisation et diaboliquement le fun, les snowblades connurent un succès fulgurant. C’est leur nom qui était sur toutes les lèvres pour désigner la discipline. C’est devenu une épreuve des X-Games d’hiver en 1998. L’hypothèque de tout le monde chez Salomon était payée… enfin, jusqu’à ce que les snowblades soient pointés du doigt pour un paquet d’accidents.
Du plaisir et des fractures en masse
Le problème des snowblades, c’est que leur utilisation était si instinctive que n’importe quel.le débutant.e se sentait capable de s’envoler pour un saut périlleux sans prendre aucune leçon.
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Ça, et leur conception originale un peu broche à foin. Sans fixations de sécurité, les skis ne se détachaient pas du pied en cas de chute. Résultat? Trois fois plus de fractures qu’en ski alpin. Les associations de consommateurs ont commencé à broncher un peu. Plusieurs stations de ski les ont bannis.
La réputation du snowblade est devenue de plus en plus désastreuse.
C’est pas la taille qui compte, mais la façon de s’en servir
Encore aujourd’hui, les puristes du ski ont les skiboards en horreur. Même si leur conception s’est 100 % améliorée, on leur reproche tous les maux du monde: c’est un sport pratiqué par des sans-desseins qui ne respectent aucun règlement et fait prendre de super mauvaises habitudes. Faire du skiboard, ce serait dire adieu à toute chance d’avoir un jour une bonne technique en ski. Mais pire que tout, beaucoup de skieurs et skieuses trouvent les skiboards ridicules. Vous n’avez qu’à voir comme ils en parlent dans les forums de discussion. Pour eux, c’est la longueur qui compte.
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Depuis la fin des années 2000, c’est donc une guerre philosophique qui fait rage. À l’opposé des puristes du ski traditionnel, il y a ceux et celles qui n’ont jamais abandonné leurs skiboards. Des adeptes de la liberté et du freestyle, qui n’ont que faire de l’intimidation concernant la petite taille de leurs skis. Pour le propriétaire du plus gros magasin en ligne de skiboards, c’est une évidence: oser faire du skiboard malgré les qu’en-dira-t-on, c’est savoir apprécier la vie dans tout ce qu’elle a de plus simple. Rien de moins.
La revanche des miniskis
De nos jours, on recommence à apercevoir des skiboards ici et là, et leur design amélioré (allô les fixations et les laisses!) ne met plus vos pattes en danger (ou du moins, pas autant qu’avant).
La tendance est même aux skis de plus en plus minuscules avec les Snowfeet. Si les skiboards sont les patins à roues alignés du ski, on peut dire que les Snowfeet sont ces espèces de souliers agaçants pour les préados avec une roulette en dessous. On a bien hâte de savoir à quel point les puristes du ski vont chialer.
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